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Technologie : « Les enjeux de l’accessibilité numérique sont largement sous-estimés »

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Alors que le numérique connaît une évolution considérable, qu’en est-il de son accessibilité ? Etat des lieux avec Benoît Thieffry, Président d’Urbilog, cabinet spécialiste en accessibilité et qualité numérique.

 

L’accessibilité numérique : qu’est-ce que cela signifie pour vous ?

L’accessibilité numérique est comparable à l’accessibilité physique, étant donné que les points de blocage sont souvent les mêmes. Lorsqu’un architecte construit un bâtiment, de trois marches à l’entrée pour qu’il ne soit pas accessible. C’est la même chose pour un site de e-commerce: si l’utilisateur remplit son panier sans difficultés et se heurte à une page de validation sans texte, il ne pourra pas concrétiser son acte d’achat. C’est pourquoi l’accessibilité, numérique ou physique, implique que l’on prenne en compte dans chaque projet toutes les contraintes possibles, de A à Z.

Par ailleurs, je pense que les enjeux de l’accessibilité numérique sont largement sous-estimés. L’informatique, en étant plus accessible, pourrait devenir un outil d’autonomie fabuleux pour des personnes qui ont du mal à sortir faire leurs courses et se sentent frustrés de dépendre des autres. Cela pourrait aussi permettre à des personnes à mobilité réduite de trouver plus facilement un emploi.

Et si la problématique de l’accessibilité concerne les personnes handicapées, elle concerne également les seniors, population en forte croissance qui dispose de temps libre et de pouvoir d’achat, qui connaît fréquemment des difficultés de mobilité, et dont 80% portent des lunettes… soit un vrai enjeu économique. Au-delà de cet aspect, une amélioration de l’accessibilité bénéficie toujours à l’intérêt général. Il est bon de rappeler qu’initialement les télécommandes ont été conçues pour les personnes handicapées. Qui n’en n’utilise pas aujourd’hui ?

 

Quelles sont les dernières avancées en date ?

La recherche vocale intégrée aux Smartphones dès leur sortie est une grande avancée, de même que les applications permettant l’accès immédiat à une traduction LSF pour les personnes sourdes de naissance, ou encore le projet de lunettes à réalité augmentée Google glass.

 

Comment rendre un site internet accessible ?

Concrètement, il est indispensable de respecter les standards de construction d’un site web html. Ce langage informatique évite toute discrimination car il permet aux outils d’assistance (synthèse vocale, plage braille…) de lire et interagir avec l’information contenue dans chaque page. Les problèmes apparaissent lorsque les concepteurs créent des sites internet avec d’autres langages, auquel cas ils doivent vérifier la compatibilité de tous les éléments et éventuellement prévoir des solutions alternatives supplémentaires. A noter qu’Urbilog propose un outil permettant aux développeurs d’évaluer eux-mêmes, sans experts, l’accessibilité de leur site internet avant de le livrer.

 

Que prévoit la loi en termes d’accessibilité numérique ?

En France, le RGAA (Référentiel Général d’Accessibilité pour les Administrations) impose à chaque site web public d’être conforme et de publier une attestation de conformité. Il est inspiré du modèle international « WAI » créé aux Etats-Unis et comporte trois niveaux : le AAA qui indique une accessibilité totale, le AA pour une accessibilité à la totalité des informations sauf du web 2.0, et le A lorsque le site ne comporte pas de point bloquant majeur.

 

Que pensez-vous de l’évolution de l’accessibilité numérique en France ?

Depuis environ trois ans, on assiste à une prise de conscience et les choses commencent à changer. Par exemple les sites web sont mieux référencés s’ils sont accessibles et si toutes leurs images sont commentées (de manière à pouvoir être audio-décrites), ce qui a un impact non négligeable notamment pour les sites de e-commerce.

Toutefois on reste encore très loin du niveau d’accessibilité développé dans les pays anglo-saxons et nordiques, où l’on voit d’ailleurs trois fois plus de personnes en fauteuil roulant sortir de chez elles. Dans ces pays les associations d’usagers sont beaucoup plus revendicatrices qu’en France et mènent davantage d’actions communes. Par exemple, deux compagnies de transports ont été récemment condamnées aux Etats-Unis suite à une plainte d’usagers non voyants qui étaient dans l’impossibilité d’acheter un billet via leurs sites internet.

 

Qu’est-ce qui pourrait faire avancer les choses ?

Aujourd’hui on n’exploite pas le potentiel du numérique à hauteur de ce qu’il devrait être avec tous les moyens dont on dispose – matériels, financiers et culturels. Il est important de sensibiliser tous les acteurs concernés par la construction d’un site web (responsables, graphistes, développeurs, créateurs, …) pour leur montrer tous les enjeux et opportunités que recouvre l’accessibilité numérique. Il est également indispensable qu’ils soient formés à la mise en accessibilité. Urbilog propose dans ce cadre des formations de deux jours, qui peuvent être financées par des OPCA dans le cadre de la formation continue.

 

Urbilog a repris récemment l’entreprise Sourdline Développement. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Sourdline est une plateforme de téléconseillers sourds destinée à faciliter la communication entre les entreprises et la communauté sourde. Il nous a semblé intéressant de rapprocher nos deux structures autour du handicap sensoriel pour compléter notre offre dans le domaine de la relation clients.

 

Plus d’infos : www.urbilog.fr

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