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Sport personnes handicapées : « À la suite d’un accident de la vie, le sport »

Michaël Jérémiasz
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Par notre partenaire Sport et citoyenneté.

Féru de sport depuis l’enfance, classé 5/6 au tennis, Michaël Jérémiasz a 18 ans quand un accident de ski le rend paraplégique. Il passe 9 mois en centre de rééducation et de réadaptation fonctionnelle et découvre par hasard le tennis en fauteuil en échangeant quelques balles avec un des professeurs de sport de son centre. Dès sa sortie, il retape ses premières balles grâce à un fauteuil de basket prêté par le centre. Il apprend alors à adapter ses gestes et son physique à cette nouvelle manière de jouer au tennis. À peine un an après sa sortie du centre de rééducation, il devient champion de France. Après avoir validé un Deug de LEA, il fait le choix d’interrompre ses études pour se consacrer pleinement à sa carrière sportive. Son ascension est fulgurante puisqu’il devient l’un des tous premiers professionnels de sa discipline en 2004. Ensuite, les succès s’empilent : n°1 mondial en simple et en double en 2005, vainqueur de l’Open d’Australie (simple et double), de Roland-Garros (double vainqueur en double),de Wimbledon (triple vainqueur en double) et de l’US Open (simple et double), sans compter ses titres de champion du monde (individuel et par équipe) et sa médaille d’or aux Jeux Paralympiques de Pékin (à laquelle s’ajoutent une médaille d’argent et deux médailles de bronze) !

Champion confirmé, Michaël Jérémiasz est aussi un citoyen engagé. Titulaire du certificat préparatoire pour sportifs de haut niveau délivré par Sciences Po Paris, il participe à la fondation de l’association « Comme les autres » et de l’entreprise sociale « Handiamo ». Un engagement qu’il renouvelle en soutenant le 17 février prochain la première édition des Débats du Sport personnes handicapées Solidaire, organisés par la Fondation FDJ et le Think tank Sport et Citoyenneté.

 

Les premiers « Débats du Sport Solidaire » traiteront de la pratique sportive des personnes en situation de handicap. Que pensez-vous de cette initiative qui met en lumière le sport personnes handicapées pour tous ? 

MJ : Je connais bien les actions de la Fondation FDJ, en faveur notamment du handicap et du sport de haut niveau. Je collabore avec la Fondation depuis quelques années sur plusieurs projets dans le cadre de l’association que j’ai créée (« Comme les autres ») et l’entreprise sociale que je gère aujourd’hui (« Handiamo ! »), donc j’ai un a priori plutôt favorable sur leurs actions !

Ensuite, bien sûr, la thématique est importante à mes yeux. Le sport a été un élément essentiel dans ma reconstruction, physique et morale, après l’accident. Le tennis m’a aidé à accepter plus facilement le fauteuil. Je ne voyais plus cet objet comme quelque chose d’encombrant. C’était l’outil qui allait me permettre de sortir de ma chambre et de rejouer au tennis. C’est devenu un jeu.

Le sport m’a aussi aidé à connaître les nouvelles limites de ce corps accidenté, abîmé. La natation, la musculation, le renforcement du haut du corps… ça m’a rendu plus fort, plus agile, donc plus autonome rapidement. De manière générale, je pense que l’intérêt du sport pour les personnes en fauteuil est là. Ça nous permet d’être plus autonomes dans la vie de tous les jours.

C’est un message que vous portez à travers les actions de « Comme les autres » et « Handiamo » ?

MJ : Oui, bien sûr. J’ai cofondé « Comme les autres » en 2011 avec mon grand frère Jonathan et ma femme Carolyn. Les objectifs que nous nous sommes fixés sont d’accompagner les personnes handicapées à la suite d’un accident de la vie dans leurs parcours de reconstruction physique, psychologique et sociale, et de contribuer par nos actions aux changements de regards et de relations entre le « monde du handicap » et le « monde valide ».

Pour ce faire, on organise des séjours sportifs à sensations fortes (bobsleigh, plongée sous glace, parapente…), qui servent de piqûre d’adrénaline pour nos participants récemment accidentés et permettent ainsi d’enclencher un processus de reconstruction et d’accompagnement social personnalisé. Depuis 4 ans, plus de 200 personnes handicapées ont participé à ces séjours.

En parallèle, nous avons créé « Handiamo ! », qui est une entreprise sociale spécialisée dans la gestion de carrières de sportifs de haut niveau en situation de handicap et l’organisation d’événements de sensibilisation au handicap et de conférences sur ce thème.

Sur ce sujet, pensez-vous que les sportifs de haut niveau, les champions, ont un rôle à jouer pour faire avancer les débats ?

MJ : Oui, mais pas plus les sportifs que n’importe quelle autre personne qui s’est réalisée dans sa vie personnelle, qui est épanouie dans sa vie de personne handicapée. Évidemment, le sport est universel, il inspire beaucoup de gens et peut faire rêver. La société a des attentes par rapport aux sportifs de haut niveau. Mais ce n’est pas parce qu’on est handicapé et sportif qu’on est forcément un bon ambassadeur. Pour moi, c’est devenu assez évident avec la création de « Comme les autres » et d’Handiamo ! Tout ce j’avais vécu pendant 15 ans, il était temps que je le partage, que je mette au service des autres mes expériences et mes compétences.

L’un des objectifs de cette conférence est de proposer des pistes de réflexion pour développer la pratique sportive des personnes handicapées. Quelles seraient vos idées sur ce sujet ?

MJ : Il y en a plein ! La question de l’accessibilité est la base. Pour pratiquer un sport, il faut déjà pouvoir se rendre au stade, au gymnase. C’est tellement évident mais il faut sans cesse le rappeler. Je pense aussi qu’il faut davantage communiquer sur les possibilités de pratique. Quand j’ai eu mon accident, je ne savais même pas que le tennis en fauteuil existait ! Pourquoi ne pas imaginer une campagne de promotion du sport personnes handicapées et de l’activité physique à la télévision et sur les réseaux sociaux, mettant en scène des anonymes, homme, femme, enfant, de tous âges, handicapés et valides ? Cette campagne pourrait expliquer les bienfaits de la pratique, le rapport à l’autre, la création de lien social, la santé… Présenter le sport comme quelque chose de sympa en quelque sorte ! Je suis effaré qu’en 2016 on me demande encore si un enfant handicapé peut faire du sport. Il y a un encore du travail à faire à ce niveau, même si beaucoup de choses ont déjà été faites…

Un mot pour finir sur votre actualité sportive. Vous rentrez tout juste des États-Unis où vous disputiez les Masters en double…

MJ : Que j’ai remportés, en compagnie de Gordon Reid (Grande-Bretagne) ! C’est la 4e fois que je remporte ces Masters. Avec Stéphane Houdet, nous sommes les seuls dans l’histoire des Masters de double à avoir réalisé cette performance ! La saison se termine bientôt, avec un gros travail de préparation physique à venir pour être prêt dès janvier pour l’Open d’Australie. 2016 sera une année importante, avec les Jeux Paralympiques de Rio. J’ambitionne d’y décrocher deux médailles d’or.

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