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Parkinson : Découvrez notre zoom sur cette maladie méconnue

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Maladie et handicap : « La maladie de Parkinson peut être un handicap invisible »

Christine Antoine, membre fondatrice de l’association Parkins’Yonne, nous propose un éclairage sur Parkinson, maladie et handicap spécifique et encore très méconnu du public.

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
J’ai été diagnostiquée parkinsonienne à l’âge de 54 ans. Je vis dans l’Yonne, où il n’y avait au départ aucune structure pour la maladie de Parkinson. Si bien que j’ai décidé de créer en 2011 l’association « Parkins’yonne », affiliée à la Fédération Française des groupements de parkinsoniens (FFGP) où je siège depuis trois ans. Cela m’a permis de rencontrer Marisol Touraine le 18 novembre 2014, lorsqu’elle a présenté son nouveau Plan des maladies neurodégénératives. Depuis je travaille beaucoup au niveau départemental, régional pour la Bourgogne Franche-Comté, avec l’ARS, avec les institutions publiques, au niveau national avec la FFGP. Il y a deux grandes structures en France pour la maladie de Parkinson : France Parkinson et la Fédération Française des groupements de parkinsoniens (FFGP). Au sein de la FFGP, nous sommes tous bénévoles et chaque groupement affilié garde sa totale autonomie.

Parlez-nous de la création de l’association « Parkins’yonne » ?
Auparavant je vivais dans l’Aube. Du coup lorsque j’ai vu qu’il n’existait rien pour la maladie de Parkinson dans l’Yonne, je me suis tournée vers mon département d’origine, où j’ai rejoint le groupe Aube Parkinson. Quand j’ai vu le bien que m’a apporté cette association, j’ai décidé de créer une association dans l’Yonne. J’ai lancé un appel avec un ami journaliste, dans le journal local « L’Yonne républicaine » pour expliquer que j’étais atteinte de la maladie de Parkinson et que je souhaitais créer une association pour permettre à toutes les personnes concernées de s’entraider. Un médecin anesthésiste parkinsonien, neurostimulé par le Professeur Pollak à Grenoble, m’a téléphoné et m’a dit : « J’avais envie de créer une association, je vais venir avec vous ». Le bureau a été fondé et l’association créée, lui président, sa compagne trésorière, et moi secrétaire. Aujourd’hui il y a environ 80 adhérents, tous des bénévoles, avec à peu près autant de personnes malades que de personnes valides (aidants).

Quelles sont les différentes activités de cette association ?
Nous avons instauré récemment de l’activité physique adaptée (APAS) avec Activ’Santé, qui dépend du plan régional sport santé de Bourgogne. Chaque semaine, nos membres peuvent pratique cette activité adaptée à leur pathologie et leurs possibilités. Cela fait du bien physiquement, cela les oblige à sortir de chez eux, et en plus il y a des moments de franche rigolade donc ça c’est un vrai moment de détente et de bien-être.

Nous organisons des réunions mensuelles d’informations concernant nos activités, les démarches que nous menons et leurs avancées, et aussi pour répondre aux questions en termes de maladie et handicap que les gens peuvent se poser, les rassurer. C’est aussi un moment où l’on peut aider pour tout ce qui est documents administratifs (MDPH, demandes d’aides…).

Nous avons également mis en place des groupes de visiteurs, composés de bénévoles qui vont voir les personnes les plus isolées. L’Yonne est un département très rural et il y a des personnes très isolées, qui en plus ne peuvent pas conduire. Nous organisons aussi des sorties et nous allons peut-être mettre en place prochainement des séances d’art-thérapie, pour faire participer malades et aidants à une activité créative.

Parlez-nous de la maladie de Parkinson.
Parkinson est très mal connu. On lui colle beaucoup d’images, qui souvent sont archi-fausses. Par exemple on pense que dès que quelqu’un tremble il a la maladie de Parkinson, alors que cela concerne seulement 60 % des malades. Et il s’agit d’un tremblement essentiel, c’est-à-dire qu’il n’apparaît qu’au repos. Donc ce n’est pas parce qu’on tremble qu’on a la maladie de Parkinson, et ce n’est pas parce qu’on ne tremble pas que l’on n’a pas la maladie de Parkinson.

Comment se traduit cette maladie ? Quels sont ses symptômes ?
En termes de maladie et handicap, les symptômes les plus visibles sont une très grosse fatigue, des douleurs articulaires dues à une certaine rigidité. De plus on devient très lent et on a parfois des blocages, on ne peut plus bouger et on ne sait pas pourquoi. Souvent la maladie commence par une dépression, et là le problème c’est que beaucoup de médecins généralistes et même des neurologues pensent que le malade est juste dépressif… et laissent de côté pendant plusieurs années un patient qui a développé Parkinson. Et quand on s’en aperçoit il a déjà perdu beaucoup d’années de traitements qui auraient pu être bénéfiques. Une dépression peut cacher un Parkinson. Ça fait mal parce que souvent le médecin va dire « C’est du cinéma, ça va aller mieux, remuez-vous… ». C’est très difficile à détecter, d’autant plus que chaque malade a sa propre maladie de Parkinson et des traitements qui sont propres à symptômes et à sa situation personnelle.

Combien de personnes sont touchées par cette maladie en France ?
La circulaire ministérielle du 7 septembre 2015 dresse le tableau des maladies neurodégénératives principales : la sclérose en plaques, Alzheimer, Parkinson… en indiquant leur fréquence par régions. Ce tableau maladie et handicap indique qu’en 2013, il y avait 195 200 malades atteints de Parkinson en France, dont 92 300 hommes et 102 400 femmes. Normalement les hommes sont plus touchés que les femmes, mais comme les femmes vivent en moyenne plus longtemps, on en décompte davantage dans les statistiques. Il faudrait revoir ces chiffres à la hausse car beaucoup sont malades et ne le savent pas et d’autres n’acceptent pas le fait d’être malades et du coup ne le déclarent pas et/ou ne se soignent pas. C’est une maladie qui est assez rare avant l’âge de 35 ans. C’est autour de 65 ans que l’on voit le plus de cas se déclarer.
En tant que maladie et handicap, Parkinson connaît un essor énorme, ne serait-ce que par l’évolution de l’environnement (pesticides, herbicides…). Il y a beaucoup plus de malades parkinsoniens en campagne qu’en ville. Les pollutions urbaines sont moins dangereuses que les pollutions agricoles. La preuve c’est que la première région la plus touchée est le Limousin, avec les arbres fruitiers. La deuxième région c’est PACA, on ne sait pas pourquoi, peut-être parce qu’il y a beaucoup de personnes âgées qui prennent leur retraite dans cette région. La troisième région c’est la Bourgogne, avec les vignes et les épandages.

Justement, les origines exactes de cette maladie sont-elles connues ?
Sur le plan médical, la maladie de Parkinson provient de la mort des neurones dopaminergiques. Un neurone dopaminergique est un neurone qui existe dans la partie noire du cerveau, l’hypothalamus. Ces neurones fabriquent la dopamine, un neurotransmetteur, c’est-à-dire qu’il transmet les ordres du cerveau à tout ce qui est organes et muscles. Quand les neurones dopaminergiques meurent, la maladie est déclenchée. Aujourd’hui elle est visiblement détectée lorsque 70 à 75 % de ces neurones sont morts. C’est déjà beaucoup trop tard et c’est pour cela que l’on n’arrive pas à la soigner actuellement. Des chercheurs travaillent beaucoup sur cette question d’un diagnostic plus précoce de la maladie. Mme Touraine a mis un point d’orgue là-dessus aussi, le problème c’est que cela coûte cher. On sait que les gens qui ont des problèmes des maladies chroniques des intestins (on dit que l’intestin est le deuxième cerveau de l’homme) ou qui perdent le goût et l’odorat d’une manière chronique sont des personnes qui risquent de développer un parkinson. Mais faire faire des examens systématiques à tout le monde reviendrait beaucoup trop cher, donc malheureusement la prévention n’existe pas.

Autrement, c’est prouvé : l’utilisation de certains produits chimiques déclenchent la mort des neurones dopaminergiques. Il y a beaucoup d’agriculteurs qui se retrouvent avec des parkinsons ou des leucémies. On en parle beaucoup. Je m’insurge contre Monsanto et compagnie parce que dans les règles européennes, un coup on va en avant, un coup on va en arrière… On ne se rend pas encore compte que de plus en plus de gens risquent de développer des cas de parkinson dans les années à venir.

Existe-t-il des traitements aujourd’hui ?
Les traitements pour guérir la maladie n’existent pas car il s’agit d’une maladie neurodégénérative évolutive, il n’y pas de guérison possible. Toutefois, c’est une maladie qui évolue par paliers, donc plus les paliers sont là et moins la maladie évoluera vite.

Les premiers traitements ont été mis au point dans les années 1960. C’était une grande évolution, car avant les gens étaient considérés comme fous, on les internait, c’était une catastrophe. Il a été constaté que la dopamine, qui était abritée par le cerveau et les neurones, avait un rôle de neurotransmetteur. La dopamine, si on la donne d’une manière naturelle à l’organisme, est détruite par le sang. Pour contourner ce problème, une molécule chimique de dopamine a été créée : la lévodopa. Celle-ci est absorbée par l’organisme sans être détruite par le sang et donc peut remplacer la dopamine… mais d’une manière insuffisante puisque la maladie continue lentement à évoluer. Et on ne peut pas augmenter indéfiniment le niveau de lévodopa car elle peut avoir des effets secondaires nombreux et parfois très violents.

Un autre traitement a été trouvé sur les 15 dernières années, les agonistes dopaminergiques. Ceux-ci incitent les neurones récepteurs à accueillir la dopamine des neurones qui sont encore en vie. Cela ralentit l’évolution de la maladie, mais les effets secondaires sont là aussi très importants, ils conduisent notamment au développement d’addictions. Des addictions psychiatriques graves aux jeux, aux dépenses d’argents, addictions sexuelles… Cela s’explique par le fait que ces médicaments agissent sur les zones de plaisir du cerveau, donc quelqu’un qui aimait faire du shopping peut se mettre à dépenser des sommes faramineuses.

La recherche continue et il y a dans le plan pour les maladies neurodégénératives toute une partie qui prévoit le soutien aux travaux de recherche et la mobilisation des chercheurs. De nouvelles techniques émergent, notamment la neurostimulation (implantation d’électrodes dans le cerveau), l’implantation de cellules souches (thérapie génique), la création d’un vaccin.

En revanche je trouve qu’il y a des traitements non chimiques qui sont également efficaces pour aider à aller mieux, notamment en agissant sur le mental. Un malade qui a un bon mental aura des paliers très longs dans l’évolution de sa maladie, alors que quelqu’un qui va rester dans la solitude et la dépression risque de la voir progresser plus vite. C’est pourquoi les neurologues préconisent de pratiquer des disciplines sportives telles que le Tai chi, le chi kong, de la danse… Ce peut être aussi de la musique. C’est un coup dur de la vie, mais si on est bien armé la maladie aura moins de prise. D’où le rôle aussi des associations de sortir les gens de leur isolement, de leur tristesse.

Souhaitez-vous ajouter quelque chose ?
J’aimerais que le regard des gens change vis-à-vis de la maladie. Cela peut venir un petit peu de nous, car nous avons parfois un air un peu retiré, le regard fixe, le visage fermé à cause des douleurs, des difficultés à marcher, à bouger, à faire des gestes fins avec les doigts… Et lorsque l’on nous fait des reproches parce que l’on met du temps à sortir des pièces du porte-monnaie par exemple, c’est difficile à entendre, d’autant plus que les parkinsoniens ont une sensibilité exacerbée. Cela s’ajoute au fait que l’on a du mal à accepter notre maladie et qu’on n’en parle pas. Donc les gens ne la connaissent pas et la jugent mal. C’est pourquoi je pense que l’on a aussi un travail à faire de notre côté pour oser dire : « J’ai un parkinson » pour en parler plus facilement et effacer toutes les fausses images qui circulent. Il faut savoir aussi que cette maladie est souvent invisible de l’extérieur, avec des moments de la journée où l’on va être bien plus en forme que d’autres.

Je souhaiterais parler également de l’application du plan des maladies neurodégénératives (PLMD). Aujourd’hui il y a beaucoup de disproportions entre les différents territoires de la France, certains où il y a tout, d’autres où il n’y a rien. J’ai rencontré récemment le professeur Joël Ankri, responsable du pilotage PLMD pour la France qui m’a assuré de son soutien, notamment pour l’Yonne. Ce plan prévoit par exemple le « zéro sans solution » au niveau des institutions départementales avec des mesures pour que leur coopération soit plus grande et que leur personnel connaisse mieux cette maladie (ARS, MDPH…). Il est aussi prévu de donner beaucoup plus de pouvoir aux associations, ce qui me semble fondamental pour faire avancer les choses.

Maladie et handicap lié à Parkinson : Pour plus d’infos rendez-vous sur : http://assoffgp.wixsite.com/ffgp ou contactez Christine Antoine au 03.86.75.64.50 et 06.16.14.53.68.

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