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La santé par la bonne humeur

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Il est courant de dire et d’entendre que pour faire face aux vicissitudes de la vie et à la maladie, le moral, c’est tout. Sigmund Freud avait repéré la résistance de certains patients aux traitements, les empêchant de recouvrer la santé. Si cette idée généralisée de l’influence du moral sur la santé est plébiscitée de façon quasi unanime, il reste à voir sur quels fondements elle repose.

 

La psychosomatique explique de par son fait même que corps et esprit sont un et que notre vie psychique et nos cellules communiquent. La simple dénomination de neuro-psycho immunologie démontre, avec son appellation, que l’immunité n’est pas que physiologique mais qu’elle implique l’action du système nerveux et de la composante psychique. Les points de vue de Groddeck et de Ferenczi sur le psychisme, tous deux médecins du siècle précédent, ainsi que ceux d’Orient, vont dans ce même sens.

Les penseurs et l’humeur bonne

Bien avant Sigmund Freud, la répercussion des émotions et des états d’âme sur la santé était connue de la médecine : aussi bien Hippocrate que Galien affirmaient que l’humeur avait une incidence sur la santé et Ambroise Paré faisait en sorte d’encourager la bonne humeur de ses malades pour activer leur guérison. Les médecines anciennes orientales, et même celle d’Occident jusqu’au XVIIIème siècle, fondaient leurs diagnostics et leurs traitements sur le fonctionnement des humeurs. L’approche linguistique nous enseigne que le mot grec kholë, la bile, est à l’origine du mot cholédoque, bien sûr, mais aussi colère et mélancolie.
L’expression courante « se faire de la bile » a conservé ce rapport du corps et de l’esprit.
Les médecines orientales, indienne et tibétaine, partent du même principe de l’union du corps et de l’esprit, ce que certains spécialistes, tel Georg Groddeck, avaient pressenti à l’époque des origines du développement de la psychanalyse. Si la psychologie moderne permet une compréhension du phénomène, en plus des observations courantes qui en sont faites, les philosophes avaient, eux aussi, leur avis sur la question : Kant préconisait la bonne humeur, Schopenhauer — que l’on considère à tort comme pessimiste — incitait à jouir de la gaieté, Voltaire choisissait de conserver la bonne humeur parce que c’était bon pour la santé, Montaigne estimait qu’il était une marque de sagesse que de montrer une jouissance constante mêlée de sérénité, Alain invitait à choisir le discours le plus tonique et Rabelais, aussi médecin, définissait la sagesse comme gaieté d’esprit.
En nous donnant leur position sur cette question, les penseurs encouragent à conserver l’humeur bonne.

Améliorer la qualité de l’existence

Mais est-il aussi facile de changer son humeur lorsqu’on est grincheux par nature, lorsqu’on a une lourde hérédité faite de tristesse, de colère, d’anxiété ? Lorsqu’on a baigné longtemps dans un environnement fait de chagrin et d’amertume ? Lorsqu’on fréquente quotidiennement la rancoeur ou la peur ? L’anatomie nerveuse, l’étude du psychisme humain et de son fonctionnement, sont là pour nous dire qu’il nous est possible d’agir : il suffit de le décider, de le désirer, même si l’on est forcé de reconnaître que ce n’est pas toujours facile de supporter le poids de la vie lorsque les évènements semblent insupportables. Il faut alors accepter de mettre le genou à terre, le temps de laisser passer l’orage, de reconstituer son énergie, de permettre au deuil de se faire puisque, comme le dit André Comte Sponville, le but du deuil, c’est la joie. Il faut aussi faire en sorte que le sentiment négatif ne prenne pas forme corporelle car celle-ci vient influer, à son insu, sur le psychisme et entretenir ce dont il serait souhaitable de se libérer. C’est sûrement pour cela que les traditions, loin d’être des systèmes coercitifs fondés sur l’enfermement et la répression de l’Être, présentent des conseils, proverbes, principes, engageant chacun à ne pas autoriser la tristesse à s’installer. Ainsi, quelques proverbes bibliques, quelques versets de textes orientaux et des extraits de textes anciens traditionnels, vont dans ce sens. Enfin, la présentation serait incomplète si on omettait de dire que la bonne humeur n’est pas une forme de paresse stérile, une sorte d’hébétude inexpressive, ni une espèce d’hilarité insensée. Elle est, au contraire, fondée sur la décision et l’action : la décision de choisir son humeur et l’action dirigée vers l’optimisme des relations humaines, l’attention portée aux mots prononcés, l’amélioration permanente du quotidien, la vigilance par rapport à sa propre humeur. En effet, celle-ci pourrait tout naturellement, et si on n’y veillait pas, suivre le cours des événements et nous entraîner vers d’inutiles fluctuations mentales. C’est à partir de cet effort constant, dont on devine à quel point il peut améliorer la qualité de l’existence, qu’émergent doucement mais sûrement, au-delà de ce que l’on appelle bonne humeur, le sommet, l’égalité d’âme que les philosophes anciens, tant orientaux qu’occidentaux, nomment équanimité. Et en laquelle ils voient une des conditions indispensables à la santé. Mais, encore une fois, ce n’est qu’une démarche de décision et d’action qui inclut ce qui pourrait être l’essentiel : la prévention.

Gilléric Leininger Molinier

A lire
La santé par la bonne humeur, 100 clés pour retrouver la bonne humeur, Gilléric Leininger Molinier, Editions Dervy, 18 euros

 

 

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