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Fédération Française Handisport : 52 disciplines ouvertes à tous

Rudi VAN DEN ABEELE, vice-président de la Fédération Française Handisport
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La Fédération Française Handisport propose 52 disciplines sportives ouvertes à tous

Rencontre avec Rudi VAN DEN ABEELE, vice-président de la Fédération Française Handisport. Rudi VAN DEN ABEELE a consacré une très grande partie de sa vie au sport dans différentes disciplines handisport, telles que la natation, le basket ou l’athlétisme. Aujourd’hui il est, en plus de son poste à la FFH, classificateur international en athlétisme, et président de l’organisation fondatrice des Paralympiques : l’IWAS (Fédération internationale du sport en fauteuil roulant et pour amputés). Il est également président du club Handisport de Bourgoin-Jallieu. Son parcours sportif est aussi éloquent. Il commence en 1972 par la natation en Belgique, puis en France il poursuit par le basket et l’athlétisme de 1979 jusqu’en 1992, en international. Son palmarès international est proportionnel à sa carrière. Nous l’avons questionné sur la pratique du handisport et son évolution en France.

Combien la FFH couvre-t-elle de disciplines sportives ?
Il y a 52 disciplines sportives gérées par la FFH, dont 17 qui sont paralympiques. Depuis plusieurs années, un certain nombre de fédérations sportives ont demandé au ministère la « délégation » et ont créé leur propre accueil des athlètes en situation de handicap. Cette initiative est louable à condition qu’il s’agisse d’une vraie volonté d’intégration accompagnée de développement et d’une connaissance du handicap. La connaissance des différentes pathologies, du handicap, c’est le domaine de l’excellence de la Fédération Française Handisport.

L’inclusion totale des personnes en situation de handicap, en particulier les handicaps « lourds », dans les fédération « valides » restera pour moi toujours une utopie. Certaines particularités du handicap pourraient mener à des situations de confusion préjudiciables pour l’athlète.

Je dois préciser qu’en France, on ne pratique pas toutes les disciplines paralympiques. Ceci n’est pas uniquement un choix « politique » ; pour certaines nous manquons simplement de pratiquants. Puis il ne faut pas oublier qu’aux Jeux Paralympiques pour qu’une épreuve ait lieu, il faut dans la « classe sportive » (catégorie de handicap) au moins 6 athlètes de 4 pays différents.

Est-ce que les classes sportives évoluent dans le temps ?
Théoriquement non ; il s’agit avant tout d’un regroupement dans la même classe de personnes en situation de handicap donc l’impact sur la performance sportive est similaire dans une limite haute et basse bien déterminée.

Quelles sont les disciplines phares ?
Tout d’abord, on trouve le basket et ceci depuis très longtemps, ensuite arrive le foot pour les personnes sourdes et malentendantes, ensuite la natation, puis la pétanque pour les personnes sourdes et malentendantes et enfin le foot en fauteuil électrique (qui est né en France), puis le tennis de table et l’athlétisme (classement avril 2019).

Voit-on apparaître de nouvelles disciplines handisport ?
Disons plutôt que certains types de handicap ont créé des disciplines spécifiques. L’exemple typique est le rugby en fauteuil roulant ; n’ayant plus leur place au basket les tétraplégiques ont développé « leur » discipline. En 10 ans, il a vu le nombre de ses pratiquants décupler. Jusqu’en 2007 il n’y avait pas assez d’équipes pour organiser un championnat, aujourd’hui elles sont plus de 15.

À ce jour, pour des raisons diverses, dans les clubs nous voyons aussi des personnes avec un handicap léger, voire même sans handicap, pratiquer le handisport. Cette pratique admise en France, dans certaines disciplines, ne l’est pas forcément ailleurs et n’est de toute façon pas admise dans les compétitions internationales.  

Depuis les Jeux Paralympiques de Londres en 2012, la médiatisation du handisport a fait un bond énorme. La conséquence est la mise en en avant de « l’exploit », « le sport spectacle » au détriment des handicaps lourds qui sont inévitablement plongés dans l’ombre. N’oublions pas qu’aux Jeux Paralympiques de Barcelone en 1992, il était inimaginable de montrer des personnes amputées en maillot de bain dans les compétitions de natation. Aujourd’hui cette même question pourrait se poser pour le handicap mental ; tous les téléspectateurs ne connaissent pas les différents types de handicap et leur impact sur la performance. 

Combien y a-t-il de clubs en France et d’adhérents ?
Sur l’année sportive 2017-2018 la FFH comptait environ 1350 structures (clubs ou sections) et environ 30 000 licences.

Quels sont les pré-requis pour pratiquer en handisport ?
À ma connaissance il n’y a pas de pré-requis en dehors du fait d’avoir un handicap. La question se pose plus en termes de pratique ; loisir ou compétition. Le handisport résonne encore trop souvent comme compétition alors qu’il y a énormément de pratique en loisirs et c’est peu connu. La pratique « loisirs » est la vocation première et la porte d’entrée au handisport. On peut pratiquer à peu près n’importe où et n’importe quelle discipline.

La différence se fait principalement au niveau de l’accueil de la structure qui reçoit les pratiquants : est-elle ou non formée à l’accueil de personnes en situation de handicap ? Un autre aspect mérite aussi notre attention, c’est le regard des parents sur leur enfant, qu’ils ne croient quelquefois pas capable de pratiquer un sport du fait d’un handicap lourd, voire d’un polyhandicap. Une pratique physique, sportive, est possible pour tous, il suffit d’offrir la possibilité de le pratiquer et d’y croire ! La pratique du sport nous montre ce qui est possible et ce qui ne l’est pas. Pendant très longtemps, la pratique du sport a fait partie de la rééducation.

Quels sont les handicaps les plus présents dans le handisport ?
À ce jour beaucoup de personnes amputées rejoignent le mouvement. L’effet Pistorius, Olivera, Vanessa Low et Marie Amélie le Fur est passé par là et a généré beaucoup de vocations. Il a aussi donné naissance au terme de « doping technologique » ; le phénomène par lequel un athlète peut performer à très haut niveau grâce à une aide technologique, ce qui est notamment le cas des lames (spatules) de course utilisées par des amputés qui ont de grands moyens ou de gros sponsors. Aujourd’hui le Comité Paralympique International étudie une réglementation de standardisation pour atténuer cette différence et faire en sorte que les aides techniques existantes soient disponibles à tous. Nous irons vers une forme de normalisation du matériel pour mettre tout le monde au même niveau technologique sans condition de ressources.

Il y aussi de plus en de plus d’hémiplégiques, inclus dans la catégorie Infirmes Moteur Cérébraux, pour beaucoup liés à une naissance prématurée. Au fil des années les causes de handicap ont changé ; nous avons de moins en moins de paraplégiques et plus aucun polio. Le niveau de rééducation a aussi beaucoup évolué et gomme de nombreux handicaps.

Quelle évolution le handisport connaît-il en France ?
Du côté du haut niveau, je dirais qu’à une époque on amenait des personnes qui avaient un handicap à une pratique sportive (rééducation). Aujourd’hui nous allons scruter les clubs sportifs valides pour voir s’il n’y pas une pépite avec un handicap minimum. Le haut niveau c’est la performance et dans beaucoup de cas on ne cherche plus que la performance. Dans les sports phares ; athlétisme et natation, les derniers médaillables viennent souvent des clubs valides. Des personnes avec un handicap léger ne pensent pas aller dans un club handisport. Par l’effet de la médiatisation la pratique « compétition » est en croissance, mais le nombre de licenciés quant à lui ne bouge pas. C’est sur ce constat que la Fédération Française Handisport cherche à communiquer que le handisport c’est aussi de la pratique sportive et pas uniquement de la compétition. Aujourd’hui nous voyons de plus en plus de sportifs individuels à la recherche de l’exploit pour démontrer qu’ils peuvent dépasser le handicap ou de faire du sport spectacle. S’il y a un sport qui arrive en France et va certainement très bien marcher, c’est le hockey sur glace qui se pratique assis sur une petite luge et où tout le jeu se fait à la force des bras. C’est un sport paralympique spectaculaire et viril qui correspond aux attentes de beaucoup de jeunes.

Trouve-t-on des clubs dans toutes les villes de France ?
Oui, on peut trouver un club multisports dans toutes les villes moyennes de France et à défaut au moins une section dans un club valide, mais ces dernières sont souvent éphémères car centrées autour d’un athlète en particulier. Des clubs mono-sport, en particulier pour le basket ou le rugby en fauteuil roulant ont aussi vu le jour, ce qui pendant très longtemps était impensable en handisport.

Est-ce facile de s’inscrire dans un club handisport ?
C’est très simple, aussi bien en loisirs qu’en compétition, il faut un certificat médical.

Le matériel adapté pour la pratique sportive est-il facile d’accès ?
Le matériel existe, il est accessible, mais il faut bien sûr avoir les moyens de le payer. La plupart des départements ou régions apportent une aide aux clubs pour l’acquisition de matériel spécifique. Pour le haut niveau il est conseillé d’avoir des partenaires car le prix d’un handbike de compétition par exemple peut dépasser les 16 000 euros. Une prothèse de course pour amputés peut dépasser les 100 000 euros, un fauteuil électrique pour le foot-fauteuil peut atteindre 22 000 euros. C’est un véritable marché de niche qui a une clientèle à travers le monde.

Les infrastructures sportives françaises sont-elles suffisamment accessibles ?
Cela dépend des villes mais aujourd’hui on peut admettre que toutes les villes mettent à disposition des personnes en situation de handicap des structures adaptées et accessibles.

Quelle place la France occupe-t-elle au niveau international dans le développement et la pratique du handisport ?
Dans la pratique, nous sommes plutôt bien placés même si on entend parfois que nous ne sommes pas dans les 10 premières nations paralympiques. Contrairement à certains pays qui permettent à des athlètes exceptionnels de participer à toutes les épreuves possibles, en France nous essayons de limiter le nombre des épreuves afin de donner le maximum de chance de réussite. N’oublions pas que l’accès aux sports en France est fantastique et que nous aidons parallèlement beaucoup de pays en difficultés à développer le handisport.

Vous qui avez eu l’occasion de rencontrer des fédérations handisport d’autres pays développés, quelles sont les différences les plus marquantes que vous avez constaté avec notre approche ?
Je dirais que c’est surtout au niveau des structures que la différence se fait. Malgré la perte de délégations, en France il y a surtout le handisport (Fédération Française Handisport) et le sport adapté (FFSA) ; regroupé ensuite sous le comité paralympique français (CPSF). Dans beaucoup d’autres pays il y a d’abord le Comité Paralympique et ensuite les fédérations sportives lesquelles intègrent le handisport. Cela représente des avantages comme des inconvénients et notamment celui de la répartition des ressources financières qui peut se faire au profit des disciplines les plus médiatisées. Dans beaucoup de pays, la surdité n’est pas intégrée dans le handisport car non reconnue comme un handicap significatif pour la pratique sportive. Les personnes aveugles sont très souvent séparées des autres pathologies et une fois encore le handicap intellectuel reste le parent pauvre pour ne pas dire qu’il n’est absolument pas représenté. Il faut rester lucide, dans les pays les plus démunis il arrive que des enfants ne survivent pas après la naissance, sans préciser que le handisport n’y est pas une cause nationale. Dans ces pays on voit peu d’IMC ou d’autres pathologies congénitales. L’aide aux sportifs est donc très inégale voire inexistante selon les pays. Le handicap reste une question de choix politique en fonction des priorités nationales. Ce que j’ai aussi pu constater c’est que les athlètes handisport continuent en nombre d’accompagner leur discipline et leur club après la fin de leur carrière et sur de longues années, ce qui se fait de plus en plus rare en France.

Comment la Fédération Française Handisport aborde-t-elle Paris 2024 et que peut-elle en attendre ?
Paris 2024 est centralisé par le CPSF (Comité Paralympique Français) qui à travers ses membres, et dans notre cas la FFH, a pour rôle de détecter et préparer dans les meilleures conditions les futurs sélectionnables. Les Jeux c’est dans 5 ans et à ce jour aucun athlète n’est assuré d’y participer. Mais en tant qu’organisateur, la France est sélectionnée d’office dans toutes les disciplines même celles qui n’existent pas encore. L’objectif que la FFH se fixe c’est d’être dans les 10 premières nations et si possible dans les 5 premières alors qu’elle est actuellement classée 12e. Mais il ne faut pas oublier les mastodontes du handisport que sont les États-Unis, la Chine, la Russie, le Brésil, l’Australie… il faut garder les pieds sur terre. Notre travail est d’amener dans les meilleures conditions le plus grand nombre vers le haut niveau d’ici à 5 ans. Un vrai challenge car il ne faut pas négliger la base : loisirs et formation.

 

Catégories de handicaps aux Jeux Paralympiques

Les athlètes participant aux Jeux Paralympiques appartiennent aux trois grandes catégories suivantes :
1. ATHLÈTES HANDICAPÉS PHYSIQUES
– Athlètes amputés et athlètes de petite taille
– Athlètes avec lésion de la moelle épinière
– Athlètes avec paralysie cérébrale : IMC (Infirmes Moteur Cérébraux)
– Autres catégories : athlètes atteints d’affections provoquant des problèmes locomoteurs et non couverts par les catégories mentionnées ci-dessus. Exemple : polio, sclérose, dystrophie musculaire, limitation de l’amplitude de mouvements
2
. ATHLÈTES MALVOYANTS ET NON-VOYANTS
3. ATHLÈTES PRÉSENTANT UN HANDICAP MENTAL OU PSYCHIQUE
– Altération significative du fonctionnement intellectuel, indiquée par un Q.I inférieur à 75 reconnu avant les 18 ans du sportif.

Les athlètes sourds ou malentendants ne participent pas aux Jeux Paralympiques. Bien qu’en France ils soient intégrés à la Fédération Française Handisport, ils sont placés sous l’égide de l’ICSD, le Comité International des Sports pour Sourds qui organise les Deaflympics. Cette organisation a quitté le mouvement paralympique il y a plusieurs années.

En photo : Rudi Van De Abbeele, vice-président de la Fédération Française Handisport.

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