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Réforme emploi et handicap : vous avez dit entreprise inclusive… ?

Loi Travail Muriel Penicaud
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Nous publions une lettre ouverte adressée au gouvernement par le club Etre qui réunit des responsables mission handicap de grandes entreprises. Cette lettre évoque l’inquiétude des entreprises face aux réformes apportées par la loi “pour la liberté de choisir son avenir professionnelle” et ses objectifs cachés sous l’appellation ” entreprise inclusive “. Les membres de ce club semblent vouloir peser sur la rédaction des décrets d’applications qui seront votés ce mois-ci . Mais n’est-ce pas un peu tard ?

“Dans le contexte actuel de rédaction des décrets d’application de la Loi « Avenir professionnel », de la mission « flash » de la députée Mme Caroline Janvier, et de la concertation sur l’offre de services d’accompagnement à l’emploi des personnes handicapées, le Club Être fait entendre la voix de ses membres dont l’engagement et l’expérience dans la politique handicap de leur entreprise -notamment via les accords agréés- impulsent concrètement le développement de la politique de l’inclusion en France.

Après la Loi du 11 février 2005, il aura fallu plus d’une décennie pour qu’une dynamique s’enclenche et porte ses fruits et pour que les stéréotypes s’atténuent au sein des entreprises. Des résultats tangibles ont été constatés dans les entreprises actives, tant par le développement des actions de compensation pour éviter la désinsertion professionnelle, le recours au secteur du travail protégé et adapté (STPA), que par la croissance du recrutement direct. Grâce aux accords agréés, les recruteurs ont concilié ces réalités du terrain et la stratégie d’égalité des chances de l’entreprise en innovant, notamment par l’alternance, pour donner à des salariés en situation de handicap les compétences recherchées par les opérationnels pour répondre à leurs clients.

Selon la Dares, le taux d’emploi direct des entreprises sous accord a progressé de 2,8% à 4,5% entre 2009 et 2016, tandis qu’il passait de 2,8% à 3,6% durant la même période pour les entreprises sans accord (source : Dares résultats N°051 – novembre 2018).
En parallèle, depuis 13 ans, l’impact des politiques publiques du handicap au plan national n’a pas été mesuré. Une conduite ambitieuse de formation de tous les acteurs n’est pas au rendez-vous, au regard des besoins.

Les entreprises membres du Club Être, conscientes que la loi « Avenir professionnel » a pour objectif prioritaire de résoudre les difficultés financières des organismes gestionnaires, constatent l’absence d’une analyse des besoins d’insertion professionnelle des personnes handicapées. Or, comme l’a rappelé la Cour des comptes dans la recommandation n°1 de son rapport de décembre 2017, il s’agit d’un préalable essentiel à la définition des objectifs de la loi.

Certaines de ses mesures portent un coup d’arrêt à la dynamique engagée. La prise en compte du parcours de vie des personnes semble à ce stade réduit, et la loi centrée sur le recrutement direct. Le maintien dans l’emploi, la sensibilisation du collectif de travail et la valorisation du recours au STPA passent au second plan. Les régressions risquent donc d’être importantes et rapides.

Nos recommandations :
Nous attendons, à l’occasion des décrets à venir, l’intégration de mesures incitatives pour :

  • donner les moyens d’un pilotage efficace et permettre une autonomie budgétaire pour gérer de façon réactive les besoins de compensation des salariés handicapés et ainsi renforcer leur employabilité tout au long du parcours professionnel.
  • maintenir la déductibilité des dépenses liées au recrutement, à l’étude, la conception et la réalisation de moyens de compensation, à l’accessibilité universelle, aux transports, à la formation, et la reconversion.
  • renforcer la dynamique du recrutement, facteur essentiel de l’inclusion avec la mise en place de bonus ou d’exonérations de charges sociales (les 12 mois suivant l’embauche).
  • préserver l’emploi des seniors et limiter le recours aux inaptitudes, avec le maintien des minorations liées à l’âge.
  • développer le recours au STPA, et favoriser notamment les filières en phase de mutation digitale.
  • poursuivre les projets et partenariats à long terme initiés par les entreprises et les acteurs de l’écosystème, aux niveaux national et territorial : formation initiale (collèges-lycées, enseignement supérieur, CFA…), formation professionnelle mutualisée par métiers, formation en Ésat/EA, sensibilisation au sein de la société (associations, SEEPH, études, médias…).

Pour toutes ces raisons, les décrets attendus en mars 2019 seront déterminants pour concilier nos ambitions communes, maintenir la dynamique engagée et permettre d’ancrer la logique de sécurisation des parcours des personnes handicapées au sein d’une société ouverte et responsable.”

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