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Dispositif Ad’Ap : Gros plan avec la Fédération Française du Bâtiment

Alain Chapuis évoque le dispositif Ad'Ap
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Fédération française du bâtiment : l’accessibilité mais pas à tout prix, gros plan sur le dispositif Ad’Ap

Alain Chapuis, référent à l’accessibilité de la Fédération Française du Bâtiment (FFB), nous explique comment le secteur du bâti s’est emparé ou non du dispositif Ad’Ap et de l’accessibilité, et quelles sont les difficultés qui persistent. 

Comment la FFB s’est-elle emparée du dispositif Ad’Ap ?
En préalable, la FFB était forcément intéressée par le dispositif Ad’Ap puisqu’elle a participé aux discussions avec Jean-Marc Ayrault (alors premier ministre) qui ont donné naissance aux Ad’Ap en 2014. Comme nous nous sommes intéressés au sujet, nous en avons fait la promotion sur toute la France à destination des exploitants d’ERP et des entrepreneurs de la FFB dans les différentes délégations départementales. Autre raison de cette implication de la FFB, un certain nombre de nos adhérents ont pu générer des marchés grâce aux Ad’Ap. Dans ma propre entreprise de menuiserie, à l’époque, nous passions notre temps à répondre à des appels d’offres de marchés publics qui commençaient par « mise en accessibilité des… » De toute une série de bâtiments publics, qui allait de la mairie à l’école, en passant par les salles communales… Le marché de l’accessibilité était clairement identifié. Dans le domaine privé, nous avons beaucoup travaillé avec des communes qui devaient se rapprocher des ERP de 5e catégorie (commerces de petite taille) pour gérer le passage du domaine public qu’est le trottoir au domaine privé que représente l’intérieur du commerce. Ce n’était pas toujours possible. Ce mouvement existe toujours. Le dispositif des Ad’Ap n’était pas parfait mais il a fait évoluer l’accessibilité du cadre bâti.

Les adhérents de la FFB ont-ils adhéré à l’obligation de mise en accessibilité du bâti neuf et de l’ancien ?
Il y a eu forcement ceux qui ont respecté la loi et ceux qui ont trainé des pieds, et pour certains c’est encore le cas. Toutes les fédérations départementales se sont quant à elles pliées aux obligations de l’Ad’Ap. Le problème vient de la manière dont la loi a été construite puisqu’elle proposait autant d’obligations que de possibilités de les contourner. Il y en a forcément toujours qui vont choisir le contournement, mais ils sont très peu nombreux. 

Dans la construction, comment se fait-il que l’on puisse encore passer à côté de l’accessibilité ?
Les premiers acteurs qu’il faut sensibiliser dans le neuf, ce sont les maîtres d’ouvrage et les maîtres d’œuvre. Il y a encore trop d’imperfections dans le neuf et ce n’est pas normal. À la base, nous constatons que les architectes, comme les urbanistes, ne sont eux aussi pas assez formés et sensibilisés. Il y a encore beaucoup à faire dans ce domaine pour que l’accessibilité devienne un réflexe. Si à la base un dossier est parfait, la suite fonctionnera, dans le cas contraire on ne peut rien garantir. Et j’ajouterai que si les travaux sont confiés à des entrepreneurs qui n’ont pas la sensibilité au handicap, le risque augmente d’autant plus. La FFB possède une marque : « Les pros de l’accessibilité », que nous devons diffuser encore plus pour atténuer ce manque de sensibilité. Ce que nous prônons au sein de la FFB c’est l’accessibilité universelle invisible, mais il y a plus de méconnaissance que de mauvaise volonté. Si nous avions sur le handicap les mêmes obligations que sur les performances énergétiques l’horizon serait bien plus clair. Un autre point qui me parait essentiel dans ce débat est celui de la représentation des pathologies dans la mise en œuvre de l’accessibilité. Le handicap est bien trop mis en avant au détriment des déficiences sensorielles et cognitives alors que les besoins sont tout aussi fondamentaux mais malheureusement moins visibles et plus difficile à comprendre. Il faut plus de sensibilisation car sans cet aspect l’accessibilité n’est pas traitée. Si des couleurs et des contrastes sont utilisés pour le handicap cognitif ou la malvoyance, rien n’est fait pour le handicap auditif. Nous n’avançons pas sur le sujet. 

Que dire des aspects de la construction que sont le gros œuvre et le second œuvre et sur leur compréhension de l’accessibilité et du dispositif Ad’Ap ? Malgré les agréments attribués par les commissions d’accessibilité il persiste beaucoup d’incohérence dans les adaptations et aménagements des ERP…
Encore une fois nous touchons au problème de la formation et de la sensibilité aux handicaps. Tout cela est géré par des bureaux de contrôles qui eux-mêmes ne sont pas formés ou sensibilisés aux besoins d’usage des personnes en fonction de leur déficience. L’application d’une norme n’est pas suffisante, il faut comprendre de quoi l’humain a besoin pour vivre sereinement son quotidien. 
Il y a déjà dans la réglementation de la construction des incohérences qui sont un véritable obstacle à l’accessibilité et la qualité d’usage, commençons par là. Le neuf ne doit souffrir d’aucune tolérance dans la mise en œuvre de l’accessibilité, ce que je ne dirai pas de l’ancien.

Quels progrès notables y a-t-il eu dans l’accessibilité des logements et que dire de la loi ELAN ?
Avant la loi ELAN, 100% des logements neufs devaient êtres accessibles. Après la loi ELAN seulement 20%. Dans ce domaine on peut différencier les loueurs publics et privés. Dans un premier temps, les logements privés 100% accessibles bénéficiaient d’une possibilité de modification par les acquéreurs non concernés par le handicap. Mais au moment de la vente ils devaient, si nécessaire, remettre l’appartement dans les conditions d’accessibilité initiales. Avec la loi ELAN nous nous sommes posé la question de savoir si 100% de logements adaptés étaient nécessaires. Est-ce que le handicap moteur qui ne représente que 8 à 9 % des personnes en situation de handicap peut imposer à toute la population ses besoins spécifiques en matière d’accessibilité et notamment en dans la répartition des surfaces des pièces d’un appartement ? La position de la FFB est de dire non, mais que ce soit pensé pour un certain nombre de logements de manière parfaite, nous disons oui. La gestion, que ce soit à la vente ou à la location de ces appartements se confronte au marché et dans le domaine public nous pouvons espérer qu’elle soit optimisée pour répondre aux attentes du public ciblé, qui n’est pas systématiquement demandeur au moment où les appartements sont sur le marché. Il existe heureusement un turnover. Par contre il n’est pas question des faire 20% de logements adaptés au rez-de-chaussée. Ils doivent être répartis dans tout le bâtiment y compris en étage pour répondre à tous les types de demandes.  À la FFB nous sommes tous d’accord sur ce principe y compris le président national. L’autre partie de la loi ELAN concerne la mise en place des ascenseurs à partir de deux étages et non trois comme précédemment. Quoi qu’il en soit, aujourd’hui un promoteur qui ne mettrait pas d’ascenseur  dans un bâtiment de deux ou trois étages se tire une balle dans le pied au niveau commercial. La question ne se pose donc pas.  Et cela même si le nombre de logements dans un bâtit est inferieur à 12.

Pour la FFB l’accessibilité doit elle s’imposer comme un critère incontournable dans toute nouvelle conception architecturale et urbaine ?
La FFB a l’opportunité d’avoir en ma personne un entrepreneur du bâtiment qui est en situation de handicap et je défends l’ensemble des handicaps. C’est une chance car j’ai un regard expert et je peux faire face à certains ayatollahs d’associations. Nous avons tous le droit à la parole mais il faut savoir aussi garder raison quand on ne représente pas du tout l’ensemble des personnes en situation de handicap. Au sein de la FFB l’accessibilité s’impose comme une évidence et nous la portons comme un étendard.

Pour en savoir plus sur la fédération Française du Bâtiment : www.ffbatiment.fr

En photo : Alain Chapuis, référent à l’accessibilité de la Fédération Française du Bâtiment (FFB), donne son point de vue sur le dispositif Ad’Ap.

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