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3ème Avenue : Rompre l’isolement en créant du lien social dans les quartiers

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Olivier Gabolde est directeur de l’association lyonnaise 3ème Avenue.

 

Pouvez-vous nous présenter l’association 3ème Avenue ?

L’association 3ème Avenue a été créée en juillet 2010. L’idée était de trouver un autre moyen pour rapprocher entre elles les personnes handicapées et dépendantes que ce qui est classiquement proposé pour des adultes. Le but étant d’activer leurs souhaits  pour avancer, plutôt que de leur imposer des solutions. Ayant été directeur d’une association de tutelle et curatelle, je suis d’autant plus sensible à ce sujet. Notre équipe est alors allée à la rencontre de personnes isolées pour établir un premier diagnostic, à travers une étude menée auprès de personnes handicapées et/ou âgées. Il en est ressorti que le lien social est fondamental pour qu’une personne aille bien, et encore plus pour une personne qui est handicapée, malade ou âgée.

 

Quel est le rôle de l’association aujourd’hui ?

Nous appuyons le lancement de deux types d’initiatives : les rencontres conviviales entre habitants du même quartier et les échanges de services entre eux.

– Au cours de notre enquête, deux personnes nous ont raconté quelque chose : Elles avaient pris l’habitude de se retrouver dans un café, puis avaient invité d’autres personnes, qui en avaient invité d’autres… et finalement un groupe d’habitants s’était formé. Nous avons décidé d’organiser des rencontres sur le même modèle, d’abord à l’échelle du quartier de Montchat. Nous avons proposé à des personnes âgées et à des personnes en situation de handicap de se retrouver deux fois par mois dans un bar, pour discuter. Cela a très bien fonctionné, si bien que nous avons lancé le même concept à Meyzieu. Aujourd’hui ces réunions accueillent toujours du monde, entre dix et vingt personnes à chaque fois.

– Un peu plus tard, un participant nous a parlé d’un échange de services qui s’était organisé au sein de son immeuble. Nous avons songé à transposer cet échange de service à l’échelle d’un quartier : celui de Meyzieu. Nous sommes allés rencontrer les personnes handicapées, âgées et/ou isolées pour leur demander si elles seraient intéressées par ce concept… et cette idée a suscité un grand enthousiasme ! Y compris pour des personnes qui ne sont pas en situation de handicap. Nous avons donc lancé, le 29 avril 2014, ce premier système d’échange de services avec l’association Majosol. Les règles de fonctionnement sont encore en cours d’adaptation et de discussion mais les participants ne manquent pas d’idées. Ainsi, un jeune infirme moteur cérébral propose de rendre service en portant des courses sur son fauteuil. D’autres proposent de raconter des histoires, de donner des cours de langues ou de chant. En somme, chacun peut proposer les services qu’il souhaite avec l’idée que quand quelqu’un rend un service, il est lui-même crédité d’un service à valoir, qui ne sera pas forcément utilisé auprès de la même personne.

On constate que les personnes dépendantes n’aiment pas trop qu’on leur propose un service, et préfèrent une logique d’échange. Cela ne provoque pas de gêne comme s’il fallait réclamer quelque chose. Nous comptons déjà 25 inscrits sur Meyzieu et nous envisageons de créer le même système à Montchat, où nous avons déjà un réseau de partenaires : APF, Jardins d’Arcadie… C’est également un quartier d’étudiants, ce qui pourrait apporter beaucoup en termes de mixité des générations. De même pour développer la sensibilisation sur les plans social et solidaire. Après, c’est à chacun d’inventer ses services selon ses envies et ce qu’il se sent capable de faire. L’objectif étant d’intégrer au maximum tous les acteurs locaux.

 

Avez-vous de nouveaux projets pour les mois et années à venir ?

Nous aimerions proposer ce type de démarches à des mairies, CCAS et administrations pour les accompagner et même pourquoi pas créer un label pour les quartiers, sur le même modèle que celui des voisins solidaires.

Pour le reste, nous ne voulons pas précipiter les choses et ces pratiques doivent encore être adaptées et réfléchies. Mais si cela fonctionne bien sur la durée, nous pourrons envisager d’étendre ce système à d’autres lieux, à Lyon et aux alentours. Tout le monde peut nous contacter, des personnes handicapées, âgées ou isolées, mais aussi des personnes qui ne sont pas isolées et souhaitent simplement participer.

 

Quel regard portez-vous sur le maintien à domicile aujourd’hui ?

– Ce qui m’a marqué en discutant avec les gens, c’est qu’on leur impose leurs « choix » la plupart du temps. Lorsqu’ils sont dépendants, ils vont voir l’assistant social de secteur qui leur indique, en fonction de leurs ressources et du GIR, ce qu’ils peuvent faire : rester chez eux avec des aides humaines ou aller vivre en institution. Le problème c’est qu’il n’y a pas vraiment de choix, tout est décidé en fonction de l’aspect financier. Et les assistants sociaux sont souvent trop surchargés pour pouvoir consacrer tout le temps nécessaire à la situation de chaque personne.

– En dehors de cela, la possibilité de continuer à vivre chez soi est une bonne chose, mais les gens peuvent rapidement se retrouver isolés. Ils peuvent d’ailleurs être isolés aussi bien en institution qu’à domicile. D’où l’intérêt de créer une troisième voie entre les deux, pour retrouver le lien social qui vient souvent à manquer : beaucoup de personnes souffrent énormément du manque d’ouverture sur l’extérieur. Le lien social est vraiment un vecteur contre l’isolement, qui lui est une catastrophe. Pour être en bonne santé, il faut du lien social.

 

Propos recueillis par Caroline Madeuf

 

Plus d’infos sur : www.3eme-avenue.org

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